Six histoires de constructeurs indépendants américains aux 24 Heures du Mans (1/2)
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Six histoires de constructeurs indépendants américains aux 24 Heures du Mans (1/2)

Alors que Glickenhaus Racing prépare sa première participation aux 24 Heures du Mans, rétrospective de six grandes personnalités américaines, constructeurs indépendants et propriétaires d’écurie, dont l’originalité a laissé une empreinte forte dans l’histoire des 24 Heures depuis 1949. Pour ce premier épisode, retour sur l’histoire mancelle de Briggs Cunningham, Carroll Shelby et Jim Hall.

« Je suis fier que notre petite équipe basée aux Etats-Unis – avec l’aide de nos partenaires et amis internationaux – s’inscrive dans les pas de Jim Hall, Carroll Shelby et Briggs Cunningham. » Ainsi Jim Glickenhaus salue-t-il dans sa propre démarche l’esprit de ses prédécesseurs, auxquels on peut ajouter Jim Hall, Roger Penske et Don Panoz. Ces pionniers sont en outre autant de destins d’exception, qui se sont lancés dans l’aventure hors norme des 24 Heures du Mans.

Briggs Cunningham, le pionnier de l’après-Guerre – Héritier d’une très riche famille américaine (son père est notamment le fondateur de la Citizen’s National Bank), Briggs Cunningham (1907-2003) se passionne pour le sport automobile… alors qu’il assiste au Grand Prix de Monaco 1930 pendant sa lune de miel. Il débute en compétition dans la foulée et construit ses premières voitures pendant les années 1940. Lors de la reprise des 24 Heures du Mans en 1949, il en fait l’un de ses principaux objectifs. En 1950, il engage dans la Sarthe deux coupés Cadillac. Si l’un conserve sa silhouette d’origine, l’autre présente une étonnante carrosserie profilée. Signée de Howard Weyman, ingénieur aéronautique chez Grumman, celle-ci hérite du surnom de « Monstre »… que Briggs Cunningham pilote lui-même jusqu’à la onzième place sous le drapeau à damier, associé à Phil Walters. Le duo est précédé au classement par l’autre Cadillac de l’écurie, aux mains de Miles et Sam Collier. Par la suite, Briggs Cunningham entre dans le top 5 à deux reprises (4e en 1952, 5e en 1954) avec la Cunningham C4-R. Celle-ci s’adjuge même la troisième marche du podium en 1954, grâce à William Spear et Sherwood Johnston. Jusqu’à sa dernière participation en 1963, Briggs Cunningham signe trois autres top 10, en 1961 (8e sur Maserati), 1962 et 63 (4e et 9e sur Jaguar). Son équipe compte également trois victoires consécutives aux 12 Heures de Sebring (1953, 54 et 55). Briggs Cunningham s’est aussi illustré sur les mers, en remportant la prestigieuse America Cup en 1958 en tant que skipper du voilier Columbia.

PHOTO (EN HAUT) : LE MANS (SARTHE, FRANCE), 24 HEURES DU MANS, 12 & 13 JUIN 1954 – En haut de la grille de départ (à cette époque par ordre décroissant de la cylindrée des moteurs), les Cunningham C4-R de Briggs Cunningham/John Gordon Bennett (n°1) et Sherwood Johnston/William Spear (n°2) termineront respectivement cette 22e édition des 24 Heures en cinquième et troisième positions (D.R. / ARCHIVES ACO).

Carroll Shelby, la marque du cobra – Après avoir été pilote instructeur de vol pendant la Seconde Guerre mondiale puis éleveur de volaille, Carroll Shelby (1923-2012) renoue avec sa passion de jeunesse pour le sport automobile. Il débute en 1952 et dispute ses premières 24 Heures du Mans deux ans plus tard sur Aston Martin, associé au Belge Paul Frère. Après avoir pris sa retraite de pilote, il devient constructeur en 1962. C’est la naissance de Shelby American Inc, avec l’objectif de se mesurer à Ferrari. Combinaison gagnante entre châssis britannique AC et moteur V8 Ford, son AC Cobra devient l’une des voitures de sport emblématiques de cette période. Evolution spécifiquement conçue pour la compétition (avec carrosserie profilée et fermée) sur la même base mécanique, la Cobra Daytona remporte sa catégorie face à la mythique Ferrari GTO aux 24 Heures 1964, avec au volant Bob Bondurant et Dan Gurney. Ford confie alors à Shelby American le développement de sa GT40. Carroll Shelby ajoute à son palmarès deux succès supplémentaires aux 24 Heures du Mans, cette fois en tant que patron d’écurie. La GT40 Mk II signe un triplé en 1966 (avec dans l’ordre Chris Amon/Bruce McLaren, Denny Hulme/Ken Miles et Ronnie Bucknum/Dick Hutcherson). L’année suivante, la Mk VI victorieuse de AJ Foyt/Dan Gurney franchit pour la première fois le cap des 5000 kilomètres parcourus aux 24 Heures. Aujourd’hui, l’héritage de Carroll Shelby est immense, avec même une postérité cinématographique. En 1968 tout d’abord, avec la Mustang Shelby de Steve McQueen dans le film Bullitt ; puis en 2019, lorsque Matt Damon incarne Carroll Shelby dans Le Mans 66 devant la caméra de James Mangold.

PHOTOS CI-DESSUS : LE MANS (SARTHE, France), 24 HEURES DU MANS. La Cobra Daytona de Dan Gurney et Bob Bondurant (n°5, capot ouvert), quatrième des 24 Heures 1964. Trois ans plus tard, Gurney remporte la course au volant de la Ford MkIV n°1 en compagnie de AJ Foyt, à l’image casqué à droite. Carroll Shelby est debout sur le muret du stand (D.R. / ARCHIVES ACO).  

Jim Hall et Chaparral, le « drôle d’oiseau » du Texas – Originaire du Texas, comme son illustre homologue Carroll Shelby, et milliardaire du pétrole, Jim Hall, né en 1935, crée Chaparral Cars en 1961. Ce nom est inspiré d’un oiseau coureur des régions désertiques américaines, passé à la postérité grâce au personnage de dessin animé « l’oiseau Bip-Bip » (« Roadrunner » en anglais). Et, à l’instar du volatile qui leur sert de logo, les Chaparral se distinguent rapidement par leur rapidité et leur originalité. Les voitures de Jim Hall se font d’abord un nom aux Etats-Unis, avec notamment une victoire aux 12 Heures de Sebring 1965. Pour la saison 1966, Chaparral décide d’un engagement en Championnat du Monde des Marques, et donc aux 24 Heures du Mans. Après une victoire aux 1000 km du Nürburgring, la première apparition sarthoise de la marque s’achève toutefois sur un abandon pour Phil Hill et Joachim Bonnier. Mais l’année suivante, la Chaparral 2F fait figure d’épouvantail par ses innovations. Outre sa couleur intégralement blanche, caractéristique des voitures de Jim Hall, et une carrosserie en matière plastique abritant un moteur Chevrolet de 7 litres et une boîte de vitesses automatique, la 2F se distingue surtout par son gigantesque aileron. Vu pour la première fois l’année précédente sur la 2E en challenge nord-américain CanAm, celui-ci permet à la fois d’augmenter la vitesse de pointe en ligne droite (en position horizontale) et l’appui aérodynamique au freinage (en position inclinée). Deux exemplaires sont engagés pour Phil Hill/Mike Spence et Bruce Jennings/Bob Johnson. En qualifications, Hill et Spence s’immiscent dans le grand duel Ford-Ferrari en signant le deuxième temps. Les deux Chaparral sont malheureusement contraintes à l’abandon, pour la dernière apparition de Jim Hall dans la Sarthe. Mais la révolution des ailerons est en marche même si, pour des raisons de sécurité, ils deviennent fixes par la suite. Chaparral a même préfiguré, avec plus de quatre décennies d’avance, l’actuel aileron arrière mobile, dit DRS, utilisé en Formule 1 depuis 2011 pour faciliter les dépassements.

PHOTO CI-DESSUS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), 24 HEURES DU MANS 1967. La Chaparral 2F de Phil Hill et Mike Spence au Pesage. On notera en haut des supports de l’aileron les vérins qui permettaient d’en contrôler l’inclinaison (D.R. / ARCHIVES ACO).

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