Jeff, l’an dernier, pour votre première participation, vous montez sur la troisième marche du podium et cette année, vous grimpez de deux marches. Une année pour apprendre et une année pour gagner ?

"Oui, c’était déjà exceptionnel de parvenir à monter sur le podium lors de notre première tentative, mais ce l’est encore plus de décrocher la victoire lors de la seconde ! La performance est remarquable et tout le mérite en revient à l’équipe. La première année, nous avons fait preuve d’humilité tout en réalisant la taille du défi qui nous attendait. Le Mans est un événement tout à fait unique, d’autant plus pour notre écurie qui dispute le WeatherTech SportsCar Championship de l’IMSA et non le Championnat du Monde d'Endurance (WEC) (dont fait partie les 24 Heures du Mans, ndlr). Nous avions tellement de choses à apprendre. Nous sommes arrivés sans préjugé avec une stratégie de survie pour ne pas prendre trop de risques. Cette année, nous avons retenu ce que nous avons appris. Notre stratégie consistait à prendre des risques calculés pour aller plus vite et gagner en intensité, mais aussi attaquer pour viser la victoire. Finalement, tout s’est très bien passé, ce qui est assez inhabituel en endurance ! Le résultat est extrêmement satisfaisant pour tout le monde."

Comment vous sentiez-vous dans le dernier relais ?

"Etrangement très calme. Comme nous n’avons connu aucune alerte pendant toute la course, nous avons eu la chance d’avoir une avance conséquente sur nos poursuivants : la marge était suffisamment confortable pour pouvoir gérer un souci éventuel. Bien sûr, comme nous l’avons vu en LM P1 cette année (allusion à la panne de la Toyota en tête dans le dernier tour, ce qui a donné la victoire à Porsche au classement général, ndlr), on ne peut pas toujours tout garder sous contrôle. Je ne pense pas qu’on puisse imaginer ou être préparer à vivre une telle catastrophe, donc notre objectif était de rester constants, prudents et intelligents jusqu’à l’arrivée. Les derniers tours dans la voiture n’ont pas vraiment été stressants : j’essayais plutôt de rester ultra-concentré, virage après virage, pour ne pas casser la voiture. Après avoir franchi la ligne d’arrivée, j’ai vraiment pris un maximum de plaisir à boucler le tour d’honneur. Après avoir célébré la victoire à la radio avec l’équipe, c’était sympa de pouvoir faire un tour lentement pour vivre pleinement l’expérience et savourer l’instant. Voir la passion des fans et les commissaires présents sur le circuit agiter les drapeaux pendant qu’on boucle le dernier tour très lentement est la meilleure façon de vraiment comprendre Le Mans."

Qu’est-ce que les 24 Heures du Mans représentent pour vous ?

"Le Mans est tout simplement le summum de l’endurance. Tous les pilotes du monde entier connaissent Le Mans et c’est un privilège extraordinaire d’être invité à disputer la course. Le Mans représente le top du top. Au Mans, vous trouvez les meilleures équipes qui engagent les voitures les plus sophistiquées pilotées par les meilleurs pilotes du monde sur l’un des circuits les plus exigeants encore en activité. Quand j’ai commencé à courir, je me souviens de la Ferrari 550 Maranello qui courait dans la catégorie GT1 au Mans et je me suis dit : 'un jour je DOIS le faire'. Maintenant, quand j’y repense, j’ai non seulement participé à la course, mais je l’ai aussi remportée et au volant d’une Ferrari qui plus est. C’est vraiment une sensation incroyable. C’est tellement bien qu’on a envie de revivre la même chose !"

Justement, après un podium et une victoire aux 24 Heures du Mans, quelle est la prochaine étape ?

"Je pense que le challenge est d’essayer de gagner à nouveau ! Après ma première expérience au Mans, ma priorité n°1 était de revenir et de prendre le départ une nouvelle fois. Cette course est unique et une expérience exceptionnelle du début à la fin. La sensation est incomparable lorsqu’on est sur le podium et que l’on voit une telle foule et une telle passion pour ce sport. On a aussi le sentiment du travail accompli. J’espère revenir pour tenter de décrocher beaucoup d’autres victoires !"

Cette année, vous avez aussi remporté les 12 Heures de Sebring dans la catégorie GTD. La victoire au Mans a-t-elle un goût différent ?

"Sebring est un véritable exploit, surtout parce que c’était la première victoire majeure de la nouvelle Ferrari 488 à travers le monde (les 12 Heures de Sebring font partie du WeatherTech SportsCar Championship dont la catégorie GTD accepte les GT3, ndlr), mais pour moi, Le Mans, c’est beaucoup plus une satisfaction personnelle. Si je ne pouvais faire qu’une seule course dans l’année, ce serait Le Mans, sans hésiter, donc remporter cette course signifie énormément pour moi."

Photo : Lors du Pesage, Jeff Segal était loin de se douter qu'il monterait sur la plus haute marche du podium le week-end suivant.

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