Les 24 Heures du Mans, en l’honneur de Luigi Chinetti
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Les 24 Heures du Mans, en l’honneur de Luigi Chinetti

CENTENAIRE DES 24 HEURES – DES MACHINES ET DES HOMMES ⎮ Triple vainqueur des 24 Heures, pionnier de l’histoire de Ferrari et de son développement aux Etats-Unis, citoyen d’honneur de la ville du Mans… Le destin de Luigi Chinetti est de ces légendes comme seules les 24 Heures du Mans ont su en susciter. Et une histoire de passion perpétuée aujourd’hui par Jim Glickenhaus.

Du côté des Etats-Unis, on dit « larger than life ». Plus grand que la vie : un qualificatif comme un parfait résumé de cette vie sans frontières qui a été celle de Luigi Chinetti. Car ce fils d’armurier, Italien de naissance, expatrié en France pour fuir l’Italie mussolinienne, puis aux Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale, est un homme d’exploits et de défis.

En 1932, il entre par la grande porte dans la toute jeune histoire des 24 Heures du Mans, dont il remporte la dixième édition dès sa première participation, associé au Français Raymond Sommer. Après une deuxième place en 1933, il s’impose une deuxième fois en 1934, toujours avec la marque au trèfle, en compagnie d’un autre Français, Philippe Etancelin, aussi célèbre pour son coup de volant que pour sa casquette retournée. Si ses participations suivantes de 1935 à 1939 s’achèvent toutes sur des abandons, le retour des 24 Heures du Mans au calendrier international du sport automobile en 1949 est pour lui l’occasion d’un tonitruant retour victorieux.

1949 : quand Luigi Chinetti « désobéit » à Enzo Ferrari

En 1949, sa troisième victoire au Mans est l’aboutissement du plus grand défi de sa carrière. Passant outre la réticence d’Enzo Ferrari à l’égard des 24 Heures du Mans, il décide de faire engager l’exemplaire de la 166 MM qu’il compte piloter par son coéquipier, l’aristocrate Lord Selsdon, lié à la couronne d’Angleterre. Après avoir tenu le volant pendant plus de 22 heures, il remporte la course et inscrit une nouvelle fois son nom dans le livre d’or des 24 Heures, en tant que seul pilote vainqueur avant et après la Seconde Guerre mondiale.

Ce succès, conquis contre l’avis d’Enzo Ferrari, va contribuer à la renaissance des 24 Heures, qui vont devenir l’un des terrains de prédilection de la jeune marque italienne, née deux ans seulement avant cette victoire. Et Luigi Chinetti va s’imposer tout naturellement comme l’homme de confiance du maître de Maranello aux Etats-Unis. Parallèlement à ce développement commercial, il crée en 1958 le North American Racing Team – également connu sous l’acronyme de NART – qui offrira à Ferrari sa neuvième – et sixième consécutive – victoire sarthoise au classement général, avec au volant l’Américain Masten Gregory. « En 1949, j’avais sept ans. J’étais sur le capot de papa en chapeau de cow-boy et en culottes courtes, se souvient dans un sourire son fils Luigi Jr. Dans les années 1960, je prenais des photos et je faisais le panneautage à Mulsanne. Il y avait Pedro Rodriguez et bien d’autres. Au NART, nous avons eu 120 pilotes différents, mais tous n’ont pas couru au Mans. Quand Pedro Rodriguez était là, nous étions toujours dans le coup et le public du Mans adorait les frères Rodriguez. »

Mais cette victoire est aussi celle d’un homme de caractère. Alors que ses pilotes Masten Gregory et Jochen Rindt sont deuxièmes après une longue remontée, à la poursuite de l’autre Ferrari leader engagée par l’importateur belge Jacques Swaters, il balaie la suggestion d’Eugenio Dragoni et Gaetano Florini, respectivement directeur sportif de l’équipe d’usine et directeur des ventes de Ferrari, de geler les positions pour assurer un doublé. Il joue sa chance jusqu’au bout et s’adjuge la victoire en tant que patron d’écurie, seize ans après celle remportée en tant que pilote en 1949. Par la suite, le NART signe sept autres top 10 au classement général pendant les années 1970, dont la troisième marche du podium en 1971 pour les Américains Sam Posey et Tony Adamowicz.

Jim Glickenhaus, l’héritier

Après la visite de Luigi Chinetti Junior aux 24 Heures du Mans 2019 pour le 70e anniversaire de la première victoire sarthoise de Ferrari, l’esprit de son père s’incarne depuis 2020 en piste dans les Hypercars de Jim Glickenhaus, riche d’une histoire personnelle forte avec le triple vainqueur des 24 Heures : « Quand j’avais environ 11 ans, j’allais à vélo à la concession Ferrari de M. Chinetti à Greenwich, dans le Connecticut et je regardais à travers la vitrine. Il m’a vu et m’a dit ‘tu peux entrer, mais ne touche à rien’. Je suis revenu le week-end suivant et cette fois, il m’a dit ‘tu peux t’asseoir dans la voiture mais ne touche a rien’, et ensuite ‘ok, tu peux mettre tes mains sur le volant mais ne touche pas au levier de vitesses’. Je restais les samedis, il me montrait des choses et je regardais les gens travailler. Puis, il m’a envoyé faire des courses à vélo à la quincaillerie.  Un jour où il pleuvait beaucoup, il m’a dit ‘tu vas être trempé’ et il m’a donné un blouson de l’équipe Ferrari ! M. Chinetti m’a appris beaucoup de choses. Il disait qu’aussi formidables soient-elles, on pouvait rendre les Ferrari encore meilleures, alors il continuait à les améliorer. C’est d’ailleurs intéressant de voir que la dernière Ferrari à avoir gagné les 24 Heures du Mans au classement général en 1965 était une de ses voitures, la 250 LM. Je suis resté toute ma vie proche de M. Chinetti, et j’ai aussi rencontré son fils Coco (surnom de Luigi Chinetti Junior, ndlr). C’est pour cette raison que j’ai fait figurer le NART sur mon Hypercar ainsi que la mention ‘en l’honneur de Luigi Chinetti, qui a ouvert la route du Mans’. »

Un hommage parmi d’autres à une légende des 24 Heures, en attendant le retour très attendu de Ferrari en Hypercar pour le Centenaire les 10 et 11 juin prochains.

PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS - DE HAUT EN BAS : Luigi Chinetti (au centre) lors de sa troisième victoire aux 24 Heures en 1949, après avoir passé plus de 22 heures au volant ; après avoir remporté ensemble les 24 Heures 1934, Luigi Chinetti et Philippe Etancelin (premier et deuxième en partant de la gauche) ont piloté une Talbot en 1938 (D.R. / ARCHIVES ACO) ; la famille Chinetti en 1949 : Luigi père et son fils, debout sur le capot de la voiture, encadrent Lord Selsdon, l'autre vainqueur de cette 17e édition des 24 Heures (D.R. / COLLECTION PERSONNELLE LUIGI CHINETTI JUNIOR) ; la Ferrari 512 de Tony Adamowicz et Sam Posey a signé en 1971 le dernier podium au classement général du North American Racing Team (NART), l'écurie de Luigi Chinetti père (D.R. / ARCHIVES ACO) ; familier de Luigi Chinetti dès l'adolescence, Jim Glickenhaus reçoit les félicitations du Président de l'ACO Pierre Fillon pour la troisième place de ses pilotes Ryan Briscoe, Romain Dumas et Franck Mailleux (ACO / FREDERIC GAUDIN). 

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