Photo : - Audi Motorsport
L’implication d’Audi en compétition s’inscrit dans la durée : depuis 1999, la firme n’a pas manqué une seule édition des 24 Heures du Mans ! Et elle ne va pas en rester là... Pour preuve, trois hauts dirigeants de la marque s’interrogent sur l’avenir du sport.
Des courses des voitures électriques sont-elle envisageables ?
Wolfgang Ullrich (chef d’Audi Motorsport) : Il y a déjà des courses pour les véhicules électriques. Elles vont devenir de plus en plus pertinentes. Je suis toutefois convaincu que le moteur à combustion sera encore présent en sport automobile dans les prochaines années – probablement en association avec des systèmes de récupération intelligents. Nous pourrions, par exemple, réutiliser l'énergie stockée lors des freinages.
Quand ces systèmes seront-ils prêts à l'emploi ?
Wolfgang Ullrich : Ils ajoutent un poids supplémentaire à la voiture – et le poids est l'un des plus grands ennemis en sport automobile. L'objectif est de travailler sur des systèmes dont le poids ne serait pas excessif. Je suis convaincu que, dans quelques années, nous verrons des systèmes qui seront plus efficaces en performances pures qu’un moteur à traditionnel.
Quand est-ce que ce sera le cas ?
Wolfgang Ullrich : Le sport automobile est sévère. Seul le meilleur système prévaut. Tant que l'efficacité globale des nouveaux systèmes sera inférieure, le moteur à combustion restera premier – à moins que les règlements soient utilisés pour nous diriger spécifiquement dans une direction. La question est de savoir si c’est l'objectif… Les systèmes ont-ils besoin de soutien pour être compétitifs ?
Michael Splett (planification et stratégique d’entreprise) : Nous avons généré plusieurs scénarios quant à la façon dont le paysage automobile pourrait évoluer d’ici 2020. Technologiquement, nous voyons deux évolutions pertinentes en sport automobile. La diversification des sources d'énergie et l'électrification.
Comment imaginez-vous les formes des futures voitures de course ?
Wolfgang Egger (chef du design d'Audi) : La conception d’une voiture de course est dictée par les choix technologiques et par les aérodynamiciens. Notre philosophie est d’essayer d’évoquer le caractère de notre marque au travers des domaines où nous avons une influence. Par ailleurs, nous adaptons, sur les voitures de route, des idées développées grâce aux voitures de course.
Par exemple ?
Wolfgang Egger : Nous adoptons des détails comme les petites ailettes. Sur les voitures de course, elles ont un rôle aérodynamique ; sur les voitures de production, elles ne sont pas nécessairement fonctionnelles, mais elles créent un lien entre la course et la série. Je vois encore beaucoup de possibilités à l'avenir dans la conception de pièces légères et fonctionnelles. Un grand nombre d'innovations sont venues du sport automobile et ce transfert se poursuivra à l'avenir.
Quelle est l'influence d'un designer sur une voiture de course ?
Wolfgang Egger : Par exemple, les phares peuvent être utilisés pour communiquer l’image d’une marque. Un prototype des 24 Heures du Mans permet une plus grande latitude qu'une Formule 1.
La Formule 1 ou le DTM sont des disciplines très réglementées. Existe-t-il un moyen de permettre aux concurrents engagés en Endurance, de travailler dans différentes directions ?
Wolfgang Ullrich : C’est en discussion. Nous pourrions imaginer qu’on ne nous fournisse qu’une certaine quantité d'énergie avec laquelle nous devrions courir 24 heures aussi rapidement que possible.

Technologiquement, comment envisagez-vous l'avenir ?
Wolfgang Ullrich : Nous sommes actuellement dans une phase difficile de prises de décisions. Des problèmes peuvent survenir quand on confronte plusieurs énergies différentes. Nous voyons déjà combien il est difficile de concilier le diesel et l'essence au Mans. Ce ne sera pas facile lorsque tous les nouveaux carburants comme l'hydrogène ou le gaz seront introduits. Il faut tenir compte des quantités d'énergie, mais aussi des capacités de stockage.
Wolfgang Egger : La surface du véhicule illustre comment la technologie peut changer le design. Jusqu'à maintenant, un véhicule électrique autonome avait des panneaux solaires sur le toit. Aujourd’hui, des peintures ont été développées pour produire de l'électricité, ce qui signifie qu'elles peuvent être appliquées à n'importe quelle forme.
A quoi ressemblerait une voiture de course complètement électrique ?
Wolfgang Ullrich : Cela dépend beaucoup de la réglementation. Une voiture propulsée par un moteur électrique n’a pas nécessairement un aspect différent. Nous essayons toujours de construire une carrosserie aérodynamique.

Le bruit ne manquerait-il pas dans une compétition de voitures électriques ?
Wolfgang Ullrich : Aujourd'hui déjà, il y a des discussions concernant nos moteurs diesels qui font moins de bruit que les moteurs de course traditionnels. Pour le moment, cette caractéristique nous distingue. Aussi longtemps qu’il y aura d'autres moteurs pour faire du bruit, ça ira... Quand tous les moteurs seront silencieux, peut-être que nous devrons réfléchir à la question. Il est possible de générer du bruit avec un apport d'énergie relativement faible. Le bruit d'une voiture de course ne doit pas nécessairement être très fort, mais doit être présent sous une forme ou une autre.
Wolfgang Egger : Le bruit apporte une partie de l'émotion.
Michael Splett : Je vois, là aussi, des opportunités. Aujourd'hui, les circuits sont isolés parce que les riverains se plaignent en permanence des nuisances sonores. L’électrique, c’est une occasion de ramener le sport automobile dans les villes. A l'avenir, il sera important que le sport automobile soit compatible avec l'environnement pour que les fans ne soient pas maudits parce qu’ils gaspillent les ressources.
Julien Hergault - D’après le communiqué Audi
Photo : INGOLSTADT (ALLEMAGNE), 19 MAI 2011. De gauche à droite. Wolfgang Ullrich (chef d’Audi Motorsport), Michael Splett (planification et stratégique d’entreprise), Wolfgang Egger (chef du design d'Audi).