Depuis l’enfance, Rebecca Jackson est passionnée par les voitures et le sport automobile. La course automobile, elle est tombée dedans lorsqu’elle était petite : à l’âge de six semaines, elle était déjà dans un paddock, son père courant à ses heures. Ce qui n’aurait pu être qu’une passion est devenu à la fois un leitmotiv et un choix de vie pour la diplômée de l’université de Bath, qui n’est jamais si heureuse qu’au volant d’un bolide.

Elle a donc décidé d’en faire son métier et essaie nombre de voitures de série afin d’aider les consommateurs à acquérir leur nouvelle auto sur internet, d’abord avec CarBuyer, puis Telegraph Cars. D’aucuns seraient satisfaits de leur sort, mais pas Rebecca : sa passion pour les 24 Heures du Mans est la plus forte et elle décide de relever le défi en 2013 avec le "projet Le Mans".

La tête sur les épaules, elle décide de procéder pas à pas et débute en achetant une modeste Porsche 924 : "Je suis allée présenter mon projet au salon Autosport de Birmingham afin de trouver des sponsors. Après un temps d’apprentissage, je suis montée à cinq reprises sur le podium et j’ai décroché ma première victoire dans des conditions dantesques. Il fallait ensuite passer à la vitesse supérieure avec des courses plus longues. Le Boxter de Porsche en British Racing and Sports Car Club (BRSCC) m’a paru un choix évident avant de passer à la Porsche 911 Cup la troisième année."

La bête est plutôt réputée rétive, ce qui n’effraie pas outre mesure Rebecca Jackson, qui, en 2016, est sélectionnée par Reiter Engineering pour prendre le volant d’une KTM X-Bow GT4 dans le championnat SRO European GT Series. Ce programme destiné aux jeunes pilotes leur permet d’avoir des formations les aidant à mieux appréhender les pneus ou l’ingénierie, mais la jeune Britannique de 34 ans est insatiable et entend accumuler les kilomètres en course : les 24 Heures de Dubaï, une course VLN avec une BMW sur la Nordschleife du Nürburgring, quatre épreuves du Mini Challenge. Et, cerise sur le gâteau : la manche de Road to Le Mans en ouverture des 24 Heures du Mans en juin dernier, cette fois dans le baquet d’un prototype.

Mise place par l'Automobile Club de l’Ouest, la catégorie LM P3 a pour but d’aguerrir les jeunes talents et les gentlemen-drivers qui désirent accéder à la catégorie supérieure LM P2. Forts de leur succès, les LM P3 figurent désormais dans plusieurs championnats dont les V de V Series et la Michelin Le Mans Cup. Un des point communs entre ces deux séries : l’écurie By Speed Factory, qui enrôle Rebecca Jackson pour la manche du circuit Paul Ricard. "J’ai découvert la Ligier JS P3 lors des essais libres de la course en mai 2016, explique la jeune Britannique. Le pilotage est très différent de ce que je connaissais car il faut vraiment piloter avec sa tête. Quand j’ai vu la voiture, je me suis dit : 'oh mon Dieu, ma petite personne va vraiment piloter ça ?' Finalement, le pilotage d’une GT donne de bonnes bases et j’avais fait plusieurs séances de simulateur, même si on n’est pas forcément préparé à piloter avec le soleil en pleine figure !"

Une petite course de quatre heures au Castellet, et hop ! sur le grand circuit des 24 Heures du Mans en juin ! "Quand j’ai descendu la voie des stands, c’était waouh ! J’étais déjà venue plusieurs fois au Mans, notamment comme pit-reporter pour NismoTV, mais là, j’étais de l’autre côté de la barrière. J’allais vraiment piloter sur le circuit des 24 Heures du Mans ! Mes parents et mon compagnon, un ancien co-pilote, étaient présents pour me soutenir et mon père allait chercher les croissants tous les matins. C’est en fait la raison pour laquelle je voulais tant courir au Mans ! Non, je blague car d’ordinaire, je mange sainement et je fais du sport comme tout pilote professionnel."

Et c’est en vrai professionnel que Rebecca Jackson a disputé la course sans avoir passé beaucoup de temps derrière le volant lors des essais, mauvaise météo et problème mécanique obligent. Malgré le soutien sans faille de sa famille, la Britannique n’a pas beaucoup dormi la veille de l’épreuve, prenant l’épreuve très au sérieux : "je n’étais pas la plus rapide en course, mais j’ai progressé tour après tour. Il y avait beaucoup de vibrations dans la ligne droite des Hunaudières et je me demandais si c’était normal. J’étais aussi très prudente car je voulais absolument rendre la voiture en entier et franchir la ligne d’arrivée. Et c’est ce que j’ai fait. C’était magique car certaines personnes me reconnaissaient dans le paddock et m’encourageaient. Après cette expérience, j’ai envie d’aller plus loin et de disputer les vraies 24 Heures du Mans dans la catégorie LM P2."

Avis aux amateurs… D’autant que Rebecca Jackson, qui a été désignée à trois reprises Michelin Inspirational Woman, ne court pas seulement pour elle, mais soutient plusieurs bonnes causes, comme la lutte contre le cancer du sein. Elle est aussi ambassadrice de la Charity Fuel Card de Shell, qui offre du carburant à des associations, et rend visite aux écoliers pour leur raconter son histoire dont ils pourront s’inspirer pour aller au bout de leur rêve. Encore une étape et Rebecca Jackson sera allée au bout du sien…

Photo : Rebecca Jackson et son coéquipier Jesus Fuster auprès de leur Ligier JS P3.