Cette année encore, la légende des 24 Heures figure en bonne place au fil des allées du salon Rétromobile de Paris (16-20 mars). En voici pour le plaisir des yeux un top 10 dont les formes, la technologie, les décorations et l’histoire ont ajouté autant de chapitres parfois glorieux, parfois insolites, mais toujours passionnants à la saga mancelle… Bonne balade !
Toyota, une victoire pour l’histoire
A tout vainqueur tout honneur… Commençons ce top 10 par la Toyota TS050 HYBRID victorieuse en 2020 aux mains de Brendon Hartley et Kazuki Nakajima. Cette voiture a rejoint l’an passé la collection permanente du Musée des 24 Heures dans le cadre d’une cérémonie qui s’est déroulée pendant l’édition 2021, en présence des dirigeants du constructeur nippon. A son volant, Sébastien Buemi et Kazuki Nakajima ont signé leur troisième victoire sarthoise consécutive. Brendon Hartley est quant à lui vainqueur pour la deuxième fois, après sa victoire de 2017 chez Porsche. Cette TS050 HYBRID est également riche d’une très grande valeur historique : il s’agit du dernier prototype LMP1 hybride victorieux aux 24 Heures, avant l’introduction en 2021 de la nouvelle catégorie reine Hypercar.
Fangio, Gonzalez et Gordini, deux Argentins pour un sorcier
Surnommé le sorcier pour son sens de la mécanique, Amédée Gordini a accueilli aux 24 Heures du Mans 1950 deux futures légendes venues d’Argentine au volant de cette Simca-Gordini T15S. Juan Manuel Fangio et Jose Froilan Gonzalez découvrent ensemble la Sarthe avant d’inscrire leur nom au panthéon du sport automobile. Le premier est cinq fois titré en Formule 1 (1951-54-55-56-57), tandis que le second est le premier citoyen de son pays vainqueur aux 24 Heures en 1954, sur une Ferrari partagée avec le Français Maurice Trintignant, trois ans après avoir offert au cheval cabré la première de ses 238 victoires en Formule 1.
1950, une participation passion
Les 24 Heures du Mans sont aussi une histoire de passionnés. Après avoir préparé la première Renault 4 CV vue dans la Sarthe en 1949, Jean Brault se lie d’amitié avec le Manceau Louis Paimpol, boucher de son état, qui décide d’ouvrir auprès de ses clients une souscription peu banale en vue de participer aux 24 Heures 1950 ! C’est ainsi que l’équipage Brault/Paimpol est au départ cette année-là sur cette Fiat-Simca 1500 Spider de 1949, dont Brault parvient à tirer 100 ch du 6 cylindres en ligne Fiat ! Si le duo est contraint à l’abandon après onze heures de course sur un problème de boîte de vitesses, cette participation pour le moins originale a ajouté un chapitre insolite à la longue lignée des Sarthois vus au départ des 24 Heures. Souvenir sans doute inoubliable pour Jean Brault et Louis Paimpol, qui ont tout de même figuré sur la même ligne de départ que les futures légendes Juan Manuel Fangio et Jose Froilan Gonzalez !
Deux Porsche pour les années 1970
Rendez-vous incontournable de Rétromobile sous le marteau toujours passionné et volubile du commissaire-priseur et ancien gentleman-driver Hervé Poulain (dix participations aux 24 Heures), la vente aux enchères Artcurial a toujours réservé une place de choix aux 24 Heures. C’est notamment le cas avec la Simca-Gordini du duo argentin Fangio/Gonzalez (voir par ailleurs), mais aussi avec deux Porsche mises en vente par le collectionneur Ernst Schuster. Ancienne voiture d’usine en 1968, le prototype 907 dispute à trois reprises les 24 Heures du Mans (1970, 71 et 72) sous les couleurs de l’équipe privée suisse Wicky, terminant septième en 1971 puis 18e en 72, où elle arbore le numéro 24. Présentée en décoration « civile », tout comme la 907, la 911 de la collection Schuster est quant à elle contrainte à l’abandon lors de son unique participation aux 24 Heures. Elle y était engagée par la structure allemande Gelo Racing de Georg Loos, éminent spécialiste de Porsche à cette période, à l’instar des frères Kremer. A son volant figurait un futur vainqueur des 24 Heures : Jürgen Barth a remporté l’édition 1977 associé à Jacky Ickx et Hurley Haywood.
Ferrari entre présence et absence…
La 365 GTB/4 dite Daytona et la BB 512 sont les deux Ferrari emblématiques de la marque aux 24 Heures pendant les années 1970. Avec une partie arrière qui lui donne un faux air… de Chevrolet Corvette, cette Daytona (n°46) engagée par le NART avait bel et bien été qualifiée par son duo français constitué de Jean-Pierre Malcher et Patrick Langlois, mais aucune des trois voitures de Luigi Chinetti ne prendra le départ de la course. L’année 1978 voit la première apparition de la BB 512 aux 24 Heures. La voiture exposée à Rétromobile (n°88) était l’un des deux exemplaires en course de l’importateur français Charles Pozzi, autre grand animateur Ferrariste des catégories GT de cette période avec le NART. Mais ses pilotes Jean-Claude Andruet et Spartaco Dini ont été contraints à l’abandon.
Lancia, une histoire italienne des années 1980
En 1982, lorsqu’entre en vigueur la réglementation technique dite du Groupe C, Porsche entame dans la Sarthe un cycle dominateur qui s’achève en 1987. En 1982, les Groupe 6, prototypes de la génération précédente, sont encore autorisés à courir. Lancia aligne alors la LC1 (carrosserie ouverte) à moteur 1,4 litres turbocompressé. Mais les deux exemplaires confiés à Riccardo Patrese/Hans Heyer/Pier Carlo Ghinzani et Michele Alboreto/Teo Fabi/Rolf Stommelen sont contraints à l’abandon. En 1983, Lancia est le premier constructeur à véritablement défier la marque allemande sur son terrain de prédilection des 24 Heures avec la LC2, lancée en 1983 et propulsée par un moteur Ferrari V8 2,6 litres turbocompressé destiné à l’origine à l’IndyCar. L’exemplaire exposé à Rétromobile (n°6) était piloté aux 24 Heures 1983 par Paolo Barilla (futur vainqueur en 1985), Jean-Claude Andruet et Alessandro Nannini. Deux autres voitures étaient au départ mais aucune n’a rallié l’arrivée. Présente jusqu’en 1985, la Lancia CL2 signe cette année-là son meilleur résultat aux 24 Heures avec les sixième et septième places.
La Porsche 917, dix ans plus tard…
Le début des années 1980 est à l’honneur sur le stand d’Ascott Collection : outre les Lancia LC1 et LC2 évoquées par ailleurs, la Porsche 917 K81 est l’une des grandes curiosités de cette période. En 1981, un an avant l’instauration des prototypes du Groupe C, les frères Manfred et Erwin Kremer, préparateurs spécialistes de Porsche et vainqueurs des 24 Heures 1979, tentent un pari insolite : ressusciter la Porsche 917. La date est propice, pour le dixième anniversaire du deuxième succès consécutif de la première Porsche victorieuse dans la Sarthe. Si de nombreuses modifications d’aérodynamique et de châssis sont nécessaires, la base mécanique (12 cylindres 5 litres atmosphériques refroidi par air) est identique à celle vue une décennie plus tôt. Baptisée 917 K81, elle est confiée à un trio français constitué de Guy Chasseuil, Xavier Lapeyre et Bob Wollek. Qualifiée 18e, elle est contrainte à l’abandon dans la soirée du samedi sur une fuite d’huile.
McLaren, les 24 Heures… et les Beatles
Petit-neveu du « Bentley Boy » Glen Kidston, vainqueur des 24 Heures du Mans 1930, Simon Kidston fait de la F1, première McLaren de route présentée en 1992, la reine de son stand pour ce trentième anniversaire. Sous le nom de F1-GTR, celle-ci s’était imposée dès sa première participation en 1995, grâce à Yannick Dalmas, JJ Lehto et Masanori Sekiya, dont le trophée du vainqueur est exposé sur le stand. On y trouve également une F1-GTR à carrosserie longue vue dans la Sarthe en 1997 aux couleurs légendaires de la compagnie pétrolière Gulf, avec au volant les Britanniques Andrew Gilbert-Scott et Ray Bellm associés à Masanori Sekiya, l’un des vainqueurs de 1995. Outre une autre F1-GTR engagée par l’équipe Bigazzi aux 24 Heures 1996 (onzième avec Marc Duez/Jacques Laffite/Steve Soper), le stand de Simon Kidston affiche également une ambiance rock avec la présence de la F1 de route personnalisée de l’ancien Beatles George Harrison.
PHOTOS (LOUIS MONNIER / ACO) : PARIS EXPO, PARIS (FRANCE), SALON RETROMOBILE, 16-20 MARS 2022.