L’innovation dans l’ADN des 24 Heures du Mans
Sous l'impulsion de Georges Durand, secrétaire général de l'ACO, les 24 Heures du Mans sont créées dans un but bien précis : contribuer à l'évolution des progrès technologiques et à l'essor de l'automobile. En 1923, seuls quelques milliers d’automobilistes se risquaient sur les chemins de France, mais la volonté – et la nécessité – de tester des solutions techniques sur une épreuve adaptée existait déjà. Au cours de l’histoire, les 24 Heures du Mans ont donc toujours servi de banc d’essai grandeur nature pour les constructeurs. Rapidement, c’est pour la course elle-même que se sont développées les innovations avant d'être adaptées, en fonction de leur pertinence, à la voiture du grand public. Parmi elles, on peut citer les freins à disque, les feux antibrouillard, l'injection d'essence ou les phares à iode. De par la spécificité de l’épreuve, qui impose aux concurrents de parcourir la plus longue distance possible, la notion de rendement énergétique (soit le rapport entre la quantité d’énergie consommée et les performances obtenues) est rapidement apparue comme un enjeu central.
Un règlement orienté vers les enjeux de l’époque
Défense de l’automobiliste, sécurité des usagers de la route, grands enjeux de la mobilité : depuis sa création, en 1906, l’ACO est un acteur à part entière de l’évolution de l’automobile. C’est fidèle à cette philosophie qu’il annonçait, dès 2010, une refonte complète du règlement de la catégorie reine LM P1. L’objectif était d’inciter les constructeurs à investir dans des solutions visant à réduire la consommation pour diminuer l'empreinte sur l'environnement, tout en rationalisant les budgets de recherche et développement grâce à des innovations technologiques applicables à la fois à la compétition et à la route. Cela ne devait toutefois pas se faire au détriment des performances ni du spectacle.
En 2014, l’ACO a donc lancé un nouveau règlement technique qui reposait sur le principe d’une quantité d’énergie allouée à chaque voiture, tout en laissant le maximum de liberté aux constructeurs sur les solutions techniques comme la cylindrée, le nombre de cylindres, la présence ou non de turbo, l'utilisation d'un ou deux systèmes hybrides, le type de stockage de l'énergie récupérée. La règlementation a permis de réduire la consommation des LM P1 hybrides de 30 % en un an, soit plus que la baisse observée ces vingt dernières années !
Pour 2018, une évolution du règlement a été proposée dans le double but de continuer à encourager le développement de la technologie hybride tout en soutenant la quête d’efficience des moteurs thermiques, turbos ou atmosphériques. Les LM P1 hybrides et non hybrides (équipes privées) se battent dans la même catégorie avec un système d’équivalence des technologies pour équilibrer les chances… et pousser les équipes à faire progresser leurs solutions dans le sens de plus de performance, plus de fiabilité et moins de consommation.
Du circuit… à la route
S’il laisse une grande liberté, le règlement des 24 Heures veille à ce que les solutions envisagées soient adaptables aux véhicules de série, techniquement mais aussi financièrement. Techniquement, les équipes sont ainsi contraintes d’utiliser un moteur quatre temps à pistons, du diesel (hybride seulement) ou de l'essence et une admission d’air libre. Autant de paramètres auxquels répondent également les voitures de série. Parallèlement, un certain nombre de matériaux ou systèmes (soupapes électro-magnétiques) sont interdits car trop coûteux pour être appliqués à une voiture commercialisée. Cette réglementation crée donc toutes les conditions pour que les innovations profitent à tous.
Les exemples de passerelles directes entre ces deux mondes a priori si éloignés sont légion. En 2001, Audi remportait l’épreuve avec un moteur à injection directe d’essence. Technologie que l’on retrouvait, deux ans après, sur la citadine de la marque aux quatre anneaux, l’A2. En 2011, l'Audi R18 était reconnaissable entre toutes grâce à ses phares à LED qui transperçaient la nuit. Une innovation plus compacte, plus légère et moins gourmande en énergie que les phares classiques, aujourd’hui disponible sur la majeure partie des modèles de série. L’expérience acquise en course profite également à ces voitures. Et vice versa, puisque les départements Compétition et Développement produit travaillent ensemble, comme le prouve Toyota. Convaincu depuis de longues années que la technologie hybride représente une voie d’avenir, le constructeur japonais y a converti une grande partie de sa gamme, ce qui lui a permis d'avoir une bonne connaissance de l'hybridation dès le lancement des prototypes dotés de systèmes de récupération et de restitution d'énergie.